« […] l’afrofuturisme : (…) existe-t-il derrière ce vocable un mouvement artistique structuré ?
Oui, répond Pascale Obolo, la rédactrice en chef d’Afrikadaa. « Bien sûr que c’est un mouvement, qui a une base et une histoire, dit-elle. Beaucoup de choses ont été écrites et théorisées aux États-Unis, […] « C’est une manière de se revendiquer, une philosophie qui permet de se redéfinir et de se libérer d’une histoire écrite par les vainqueurs.
Tout ce qui est impossible devient possible dans le futur. » Avec une telle présentation, le travail de l’artiste anglo-nigérian Yinka Shonibare MBE peut résolument être présenté comme afrofuturiste. […] Dans la même veine, mais avec un travail radicalement différent, l’artiste angolais Kiluanji Kia Henda propose Icarus 13, une installation sur la première mission spatiale de son pays vers le Soleil, qui n’eut jamais lieu…
« Je ne pense pas qu’on puisse qualifier l’afrofuturisme de mouvement, selon moi il s’agit plus d’un mélange éclectique de personnalités qui travaillent dans des domaines différents mais qui partagent une certaine esthétique », déclarait pourtant Kipwani Kiwanga à Afrikadaa. Une approche que rejoint Oulimata Gueye, qui travaille sur Africa SF, projet explorant les liens entre fiction, culture numérique, sciences et utopies à l’échelle du continent. « Personnellement, je […] préfère les termes de “fiction spéculative” et de “science-fiction”. »
Même son de cloche chez la commissaire d’exposition Salimata Diop, directrice artistique de la foire Akaa : « Je ne crois pas que le terme soit encore pertinent aujourd’hui. Un mouvement artistique se définit par une esthétique commune, or ce qui unit les artistes dits afrofuturistes, c’est un sujet. […] on voit des créateurs se prêter à l’exercice – imaginer un monde utopique et futuriste – dans leurs styles respectifs, propres et variés. »
Les vidéos de la Kényane Wangechi Mutu explorant la condition féminine, les photos du Belgo-Béninois Fabrice Monteiro sur les dégradations environnementales ou encore les lunettes du Kényan Cyrus Kabiru réalisées avec des objets de récupération sont souvent qualifiés d’afrofuturistes alors même qu’elles relèvent d’esthétiques très différentes.
« J’ai bien peur que la tendance afrofuturiste fascine avant tout parce que, après des siècles de stigmatisation, on est habitués à voir l’Afrique associée au passé, poursuit Salimata Diop. Le continent, c’est souvent, dans les esprits, les traditions ancestrales par opposition à l’innovation, le lien à la nature par opposition à la culture et à l’urbanisation, l’inné par opposition à l’acquis. C’est triste, mais un univers visuel moderne ou de science-fiction situé en Afrique demeure une image surprenante et originale. […]. » […]
> Extraits de l’article de Nicolas Michel publié sur jeuneafrique.com à retrouver en intégralité en cliquant sur http://bit.ly/2fcgwgc